Emmanuel et Christiane Padioleau ont été maraîchers au Grand Portail, une tenue maraîchère du quartier de Portechaise. Âgés aujourd’hui de 93 et 94 ans, ils plongent dans leurs souvenirs, racontent les débuts difficiles pendant la guerre, la rudesse du travail avant l’arrivée des tracteurs, la carotte longtemps cultivée puis suppléée par la mâche.
Emmanuel Padioleau campe le paysage : « la tenue maraîchère du Grand-Portail, dans le quartier de Portechaise, où nous avons longtemps exercé nos activités de maraîchers était une tenue maraîchère de petite taille. Elle s’étendait sur un hectare et demi. Elle avait été cultivée avant par mon père, qui l’exploitait avant la Seconde Guerre mondiale. »
Quand il a débuté, rien n’a été simple
« La période 1939-1945 fut une période difficile. L’eau pour arroser était contingentée. Pendant la guerre, la ville a connu les bombardements. Une bombe était même tombée dans le lit d’une employée ! se remémore l’ancien maraîcher. À cette époque nous avions dû nous réfugier au Landreau et abandonner le Grand Portail ».
Leurs légumes étaient expédiés à Paris et Londres
Il raconte qu’ « à 15 ans, je suis allé me former à l’école d’agriculture de Pouillé, aux Pont-de-Cé, près d’Angers. Dans la tenue, nous cultivions toutes sortes de légumes, carottes, concombres, salades… Avant l’arrivée du melon charentais, nous cultivions le melon Prescott » . Les légumes étaient transportés dans la camionnette jusqu’à la gare de Pont-Rousseau. Ils étaient vendus par un mandataire qui les expédiait ensuite vers Paris, et même Londres pour les carottes.
Pousser les wagonnets, sur 400 m de rails
« Le gros du travail était surtout au printemps, souligne Emmanuel Padioleau . Dans la tenue maraîchère, pour faciliter le transport des châssis, du fumier, du sable, nous avions des wagonnets. Il y avait ceux avec un plateau et ceux avec une benne. À l’intérieur de la tenue, nous avions plus de 400 mètres de rail. Dans le sens de la pente, cela descendait tout seul, mais quand il fallait remonter les wagonnets il faillait pousser. »
Son épouse, Christiane Padioleau opine. Elle ajoute : « En me mariant à un maraîcher, je savais que le travail qui m’attendait serait rude. Je ne fus pas déçue ! Mais à 20 ans, on n’a peur de rien. Les journées étaient bien remplies. les tâches ménagères m’attendaient le soir à la maison et les enfants aussi » .
Devenus Goulainais en 1968
« Nous avons fait aussi du muguet, mais cela n’a pas été notre activité principale. À la période du muguet, il fallait abandonner ou plutôt délaisser tout le reste. Le travail intense du muguet monopolisait les huit jours qui précédaient le 1er mai. »
De plus, elle se souvient que « pour le muguet, nous n’avions qu’une petite équipe, mais il y avait une très bonne ambiance, quand c’était fini on faisait la fête » .
Le couple est installé à Haute-Goulaine depuis 1968
« là où il y avait des bois et des prairies. Pendant de nombreuses années, nous avons exploité simultanément Haute-Goulaine et Saint-Sébastien. La carotte fut notre culture principale et elle fut remplacée par la mâche, souligne Christiane Padioleau. Les petits oignons partaient à la conserverie des maraîchers nantais qui était installée route de Clisson, près de la gare de Vertou. » Il faut se souvenir qu’en ce temps-là, l’économie sébastiennaise reposait pour beaucoup sur la production alimentaire.
Cet article est paru dans Ouest-France le 05/01/24